Incursion au Pérou et en Bolivie

En 2003, j'ai été invité à vivre au sein d'un petit groupe de personnes, un voyage au Pérou et en Bolivie qui se ferait au début de l'été. Je savais devoir me rendre en ces pays pour rencontrer la Croix du Sud et faire une connexion énergétique avec cette constellation qui habite le ciel austral.

Nous sommes descendus dans la capitale du Pérou qui, indifférente à notre arrivée, sommeillait sous son ciel de lit étoilé. Malgré l'obscurité que tentaient de combattre sans conviction quelques faibles lampadaires, notre première maison d’accueil avec ses balcons fleuris et son petit jardin intérieur fermé par des barrières métalliques attirait le regard. Le tout avait un aspect invitant. Je me suis rapidement endormi en pensant que le lendemain nous ferions une visite de la ville.

Le surlendemain dans notre ballade nous conduisant vers le sud, nos regards se posaient sur des terres désertiques ressemblant étrangement à celles de l'Égypte et, comme pour accentuer la similitude, ce territoire sablonneux nous a présenté quelques pyramides. Visiblement abandon-nées à elles mêmes depuis fort longtemps, elles étaient là, esseulées, attestaient d'un passé plus glorieux.

En route vers Puno, un site inca, qui du haut de sa colline veillait sur les alentours, nous conviait à une visite des lieux. L’accession à cette élévation se fait par un long et large escalier de pierres, aux marches fortement asymétriques. Sur ces hauteurs, notre guide nous conduisant à un cercle dépourvu d'herbe, a indiqué qu'il s'agissait d'un vortex probablement créé par une civilisation pré-incaïque. (Je sais maintenant que cette civilisation était Atlante) Nous l'avons entouré nous tenant par la main et j'ai immédiatement su que je devais aller dans le vortex. Au centre, l'énergie était si yang qu'elle provoquait chez moi des tremblements. J'ai appelé le Mahatma lui demandant d'équilibrer ces vibrations et, une énergie d'une indicible douceur est entrée dans mon bras droit relevé vers le ciel, pour descendre jusque dans la terre. A ce moment, j'ai eu la certitude que le travail de balancement des énergies était accompli.

Depuis ce temps lorsque l’énergie commande à toutes les cellules de mon corps d’agir de la façon qui m’est inspirée, je le fais immédiatement quels que soient les circonstances et les jugements qui peuvent être portés à mon égard. Nous avons quitté le site alors que le soleil disparaissait à l'horizon éclairant nos pas de ses derniers rayons et nous avons complété notre descente aidés de quelque lampes de poche, - pâles lumières dans une complète obscurité.

Nous avons dormi à Puno. Quelque chose de négatif, de dysharmonieux existe dans les énergies de cette ville et de la région. C'est avec un certain soulagement que j'en suis reparti le lendemain. Nous faisions route vers l'île de Taquile dans le grand lac Titicaca (nom qui signifie, puma gris, en Quéchua). Cette île où les infrastructures touristiques sont à peu près inexistantes, est un endroit idéal pour observer la vie et les coutumes des habitants du pays. Deux ou trois restaurants - où on vous sert inévitablement les mêmes mets - et un nombre limité de chambres sont à la disposition des visiteurs.

Retournés à Puno pour y passer la nuit suivante, nous nous sommes ensuite mis en route vers Copacabana en Bolivie. Le lendemain nous sommes allés rendre visite à l'île du Soleil. Aussitôt débarqués, nous avons refait connaissance avec les inévitables sentiers et escaliers de pierres, ornements obligatoires dans le paysage de cette terre qui fut jadis la patrie d'une civilisation affectionnant les hauteurs.

L’île du Soleil apparaît comme le sommet d'une montagne qui, tel un joyau, surgit des profondeurs du lac pour en accentuer la beauté. Accompagnée de l'île de la Lune et d'îlots, elle forme un minuscule archipel faisant sans aucun doute partie de la même élévation sous-marine. Le sentier ascendant nous conduisant au centre de l'île nous offre les plus beaux paysages qu'il m'ait été donné de voir à ce jour. Le soleil brillait dans un ciel sans nuages, sur le lac d'un bleu pur et profond formant d’étroits couloirs entre les îlots, tandis qu'à l'arrière plan se profilaient au loin les pics blancs des montagnes boliviennes.

Le lendemain: - départ pour La Paz par la route de l'Altiplano, cet immense plateau dont l'élévation se situe entre 3400 et 4200 mètres. A part l'oxygène raréfié dans l'air, ce sont d'étranges petites montagnes solitaires, portant bonnet et poncho blancs de neiges éternelles qui soulignent le mieux notre altitude. Ici, la forêt est inexistante. La végétation se compose d'arbustes et de broussailles. Quelques fermes démontrent pourtant que l'agriculture et l'élevage sont encore praticables à ce niveau. Les minuscules villages se tiennent très éloignés les uns des autres comme pour éviter les fréquentations trop nombreuses pouvant entacher leur individualité. Un soleil rouge, gardien de ces paysages, nous suivait à toute vitesse jetant vers nous un coup d'oeil furtif entre les buissons, et rassuré, il est finalement parti éclairer un autre monde qui l'attendait. Devant ses derniers rayons qui quittaient un ciel bleu sans nuages, mon ressenti me parlait de beauté paisible et de profonde solitude.

Le soir de notre arrivée, La Paz nous attendait illuminée jusque sur les bords de sa cuvette. Les conquérants, venus d’Espagne, ont imité les autochtones en établissant leurs habitations dans ce lieu encerclé de montagnes. On suppose que c'était pour se mettre à l'abri des vents de l'Altiplano.

Notre périple nous a ensuite conduit à Tihuanacu, où s'est clairement manifesté le but de mon voyage. Il existe en cet endroit un site dont les murs de pierres forment un rectangle où le soleil à son lever le jour du solstice d'été, entre exactement dans un alignement de portails. J'étais cependant attiré par la colline voisine sur laquelle les archéologues avaient en partie dégagé un autre site ayant la forme d'une croix andine. Une énergie que je n'avais jamais ressentie dans ma présente incarnation mais qui m'a pourtant semblée familière s'est emparée de moi et, pendant la méditation j'ai vu un prêtre-astronome vêtu de blanc, accomplissant un rituel de connexion avec la Croix du Sud, afin de faire descendre sur le peuple les bienfaits de ses énergies. Dans le ressenti accompagnant cette vision, j'ai compris que j'étais venu fermer la boucle d'un travail inachevé lors d'une vie antérieure. Depuis mon enfance, le nom de la Croix du Sud évoquait pour moi quelque chose d'attirant et de mystérieux, mais j'ignorais complètement que ces quatre étoiles formaient la constellation sacrée des Incas. J'ai donc quitté l'endroit avec le sentiment du devoir accompli qui consistait à refermer un maillon de la chaîne rattachant mes différentes incarnations.

Nous avons quitté La Paz, pour nous rendre à Cusco au Pérou. C'est impressionnant de voler à basse altitude au-dessus des Andes. On croirait que ce vaste territoire fut jadis un terrain de jeu pour des géants qui se sont amusés à empiler des rochers les uns sur les autres jusqu'à ce que la pointe ainsi formée ne le permette plus. Les montagnes se tiennent en rangs serrés comme une armée prête au combat. Quelques parcelles du territoire qui, pour garder leur identité ont refusé le soulèvement, forment de petites vallées habitées, parfois reliées les unes aux autres par un chemin en lacet tracé aux pieds des montagnes.

La piste d'atterrissage de Cusco étant très courte parce que située en terrain accidenté, le pilote qui doit se préparer à une descente rapide de l'avion va jusqu'à presque frôler le dernier sommet avant de se poser. Ceci donne pour un instant, aux passagers, qui en ignorent la raison, la désagréable impression qu'ils sont arrivés à l'heure de faire leur transition dans un autre monde. Dès ce moment passé, la piste apparaît et l'avion fait un nouveau plongeon. En quelques instants nous touchons le sol et nous voilà à Cusco, ancienne capitale de l'empire inca dont le nom quéchua signifie, ''le nombril''. J'ai tout de suite vraiment aimé cette ville accueillante, me sentant immédiatement en parfaite harmonie avec ses énergies. J'ai pris plaisir à la découvrir en me promenant sur les trottoirs, m'arrêtant dans les boutiques à la recherche de quelques souvenirs.

C'est par la voie ferrée que nous sommes partis pour Aguas Calientes, ville située aux pieds de la citadelle de Machu Picchu. A travers ces montagnes le tracé d'un chemin de fer ne peut que suivre le cours d'une rivière qui, dans ce cas, est celui de l'Urubamba. Nous sommes donc montés dans un train qui au premier coup d'œil, me semblait fatigué. Évaluant son âge et pensant au fait qu'il devait depuis longtemps rouler sur une voie étroite et très sinueuse, je l'ai finalement trouvé plutôt sympathique. Pendant le trajet j'ai compris que de voyager ainsi, jour après jour, depuis des années, près d'une rivière qui se cache dans des montagnes dont l'élévation ne laisse trop souvent apparaître que le soleil du midi, il y a matière à attraper la lassitude. Nous faisions vraiment figure de minorité visible parmi les nombreux passagers qui montaient ou descendaient à des arrêts parfois situés en pleine forêt, où un simple toit servait de gare. Les artisans des alentours venaient nous offrir divers objets et nous pouvions également acheter de la nourriture. Le tout s'échangeait contre monnaie, par les fenêtres du train que les vendeurs suivaient sur quelques mètres lorsqu'il se mettait en branle, tentant dans ultime effort gestuel et vocal de compléter une vente supplémentaire.

L'obscurité venue, passant entre deux sommets une lune inquisitrice pointait son regard sur nous. Reine incontestée dans son immense palais d'azur, elle tenant à distance quelques petits nuages blancs qui n'avaient pourtant rien de belliqueux. Me glissant sur la banquette pour m'approcher de la fenêtre, j'ai longtemps regardé la Croix du Sud qui apparaissait, puis disparaissait au gré des courbes de la rivière que le chemin de fer avait été forcé d'épouser dans un mariage de raison. De par sa quadruple vision, la constellation veillait sur cette terre péruvienne, sachant que de bons sentiments à son égard vivaient toujours, ancrés dans l'inconscient collectif d'un peuple qui jadis l'a honorée et aimée.

Aguas Calientes est une petite ville agréable, qui doit sa prospérité au fait qu'elle est le point de départ pour les touristes qui vont visiter Machu Picchu. Un autobus nous transporte aussi haut que possible dans la montagne. Au-delà de ce point d'arrêt, les seuls véhicules de transport dont nous disposons, ont idéalement deux pieds bien chaussés, alimentés par l'énergie d'un corps physique sain et pourvu de poumons pouvant s'accommoder de l'air en altitude. J'ai rapidement constaté que les montées et descentes dans les sentiers et escaliers de pierres que nous avions connus jusque là, n'étaient qu'un entraînement nous préparant à l'escalade de ce célèbre pic.

Les sensations vécues sur le sommet, valaient largement les efforts exigés pour m'y rendre. Je me suis alors retrouvé dans l'énergie d'une autre époque que mon mental cherchait vainement à situer. Partout où mon regard se posait, il ne rencontrait que des pics de montagnes, donnant devant cette nature inviolée, l'impression d'un monde nouvellement créé, impression que la lumière d'un soleil encore mal défini dans un ciel nébuleux venait accentuer. J’avais l’étrange sentiment que l'extraterrestre et le terrestre se confondaient sur ce plateau. Pour revenir à la réalité du moment, j'ai marché vers un abri au toit de chaume érigé pour ceux qui souhaitent passer la nuit sur ces hauteurs dominant le village inca, situé en contrebas.

Nous étions de retour à Aguas Calientes en fin d'après-midi. Nous descendions du véhicule tout près du quartier des boutiques qu’il nous fallait traverser pour nous rendre à l'hôtel. Sentant s'avancer la fin du voyage, certains en ont profité pour compléter leurs achats de souvenirs. Après le repas du soir quelques personnes sont allées se baigner dans les eaux chaudes qui se disent ''aguas calientes'' en Espagnol. Cette source, présent que la nature a offert à ce coin de pays, est un important attrait touristique.

Le lendemain, je n'avais pas la moindre envie d'accompagner ceux qui sont retournés à la montagne. Pour moi, le voyage était terminé. J'avais fait ce que j'avais à faire, j'avais donné ce que j'avais à donner et reçu ce que j'avais à recevoir. Le jour suivant un avion nous a directement ramenés de Lima à Montréal.